Donatistes

De Christ-Roi
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Tenants du mouvement chrétien hérétique des IVe et Ve siècles, qui estimait que la valeur des sacrements dépendait du caractère moral du ministre.

Contexte

Les persécutions de Dioclétien (303-305) avait déterminé, en Afrique, de nombreuses défaillances, principalement parmi les riches et parmi les dignitaires de l'Église. Les uns avaient apostasié formellement et sacrifié aux idoles (lapsi); les autres avaient présenté aux magistrats, qui les acceptaient par complaisance ou moyennant rémunération, des certificats attestant qu'ils adoraient les dieux de l'empire (libellatici); des évêques et des lecteurs avaient remis, pour être brûlés, les livres sacrés ou, sous ce titre, des livres hérétiques ou d'autres écrits (traditores, ce qui signifie en latin « livreurs (des objets sacrés » et aussi « traîtres ». ). Par une réaction fort naturelle, ces apostasies et les subterfuges équivalents avaient suscité chez les fidèles, et particulièrement chez les pauvres, l'admiration et la recherche enthousiaste du martyre, en même temps que le mépris pour ceux qui avaient renié leur foi ou défailli à la sincérité chrétienne devant les païens. L'Église dans sa majorité était tolérante envers ceux qui avaient failli (les lapsi) et réintégrait les prêtres et évêques qui réembrassaient le christianisme.

Les réunions pour la succession de Paulus (évêque traditor) en 307 firent apparaître l’opposition des « purs » contre ceux qu’ils qualifiaient de « traditores ». Le conflit ouvert éclata en 312 lors de la succession de l’évêque de Carthage Mensurius. La nomination de Cæcillius fut contestée : puisque il avait été ordonné prêtre par Mensurius, évêque « traditor », son ordination n’était pas valable, donc il ne pouvait être évêque. Entraînés par l’évêque Donat, 70 évêques de Numidie élirent contre lui un évêque concurrent Maiorinus.

Le conflit se poursuivit sur le terrain juridique : l’affaire remonta à l’arbitrage impérial, sollicitant Constantin Ier qui venait de récupérer l’Italie et l’Afrique par sa victoire sur Maxence. Considérant qu’il s’agissait d’un problème mineur entre chrétiens, Constantin demanda au pape Miltiade (311-314) de s’en occuper. Un concile fut organisé en 313 dans le palais de Latran avec 18 évêques italiens et gaulois. Donat s’obstina dans la contestation de l’ordination de Cæcillius par un évêque qui avait failli. Le concile de Latran confirma la validité de cette ordination par l’argumentation suivante : si le Christ est présent dans tous les sacrements, un sacrement est effectif quelque soit les antécédents du prêtre qui le délivre. Donc l’ordination de Cæcillius par Mensurius était valable.

Les donatistes, obstinés, firent de nouveau appel à Constantin, qui dut s’impliquer plus sérieusement. Le concile d’Arles en 314 rendit la même décision que celui de Latran, et une loi édictée en 317 par Constantin ordonna la dissolution des communautés donatistes et la confiscation de leurs églises.

Les donatistes contrôlaient de nombreuses communautés, l’application de la loi s’accompagna de nombreuses violences, à Carthage et dans les provinces africaines. Pour rétablir le calme, Constantin suspendit en 321 l’application des mesures répressives. Les donatistes se maintenaient donc, crispés sur un esprit de rigorisme et d’opposition avivés par les violences qu’ils venaient de connaître. Eux seuls étaient les purs, ils étaient « fils des martyrs » et sans compromission, face aux « fils des traditores » . Tout sacrement venant d’un prêtre indigne à leurs yeux était nul, donc ils rebaptisaient ceux qui avait reçu le baptême hors de leur communauté.

Vers 340, des bandes d’ouvriers agricoles itinérants, les circoncellions, se dressèrent contre les propriétaires terriens, les forçant par la violence à annuler les dettes et affranchir les esclaves. La convergence entre les donatistes et les circoncellions ne tarda pas. A la même époque, l’empereur Constant Ier envoya en Afrique deux commissaires chargé d’apaiser les querelles religieuses en distribuant des secours aux communautés. L’évêque Donat, toujours en place, refusa tout subside, rejetant l’ingérence du pouvoir dans son Eglise. La tournée des commissaires dégénéra en affrontements armés contre les donatistes aidés par les circoncellions. L’évêque donatiste Marculus périt lors de son emprisonnement, tombant dans le vide depuis un rocher. Les donatistes le proclamèrent martyr, tandis que ultérieurement Augustin y vit un suicide rituel.

En 373, Valentinien Ier interdit aux donatistes la pratique du repabtême. Dans les années 372-375, les donatistes sont mêlés à la révolte du chef maure Firmus en Maurétanie. En 376, Gratien renouvelle l’interdiction de l’église et du culte donatiste. A partir de 385, le comte d’Afrique Gildon protégea et encouragea le donatisme, et finit par se révolter contre le pouvoir impérial en 397-398. Vaincu, il laissait les donatistes au sommet de leur force, mais isolés.

Saint Augustin, évêque d’Hippone en Afrique Proconsulaire à partir de 395, développa ses arguments pour contrer le donatisme : distinguant deux dossiers, la « causa Cæcilliani », vieux conflit de personne qui appartenait désormais au passé, et la « causa ecclesiae », où il critique l’attitude religieuse étroite et puritaine des donatistes et affine l’argumentation de St Cyprien sur la validité des sacrements. Les arguments d’Augustin n’eurent aucun effet sur les donatistes, qui poursuivirent leurs violences et contraignirent l’Eglise orthodoxe à réclamer de l’empereur Honorius de nouvelles sanctions. Son édit de 405 assimilant les schismatiques aux hérétiques exposait désormais les donatistes à toutes les lois répressives.

En 411 les évêques donatistes ne purent se dérober à un concile organisé à Carthage entre les deux églises officielle et schismatique, sous l’arbitrage du commissaire impérial. Plusieurs centaines de représentants de chaque tendance y participèrent. Au lieu de débattre des aspects religieux sur les exigences de probité du sacerdoce et la validité ou non de ses sacrements, les donatistes s’enlisèrent sur la querelle de l’élection de Cæcillius, un siècle plus tôt. L’arbitrage rendu leur fut défavorable, et une loi prise à Ravenne en 412 définit la répression contre les récalcitrants : lourdes amendes pour les adeptes du donatisme, exils pour leurs évêques, confiscation des lieux de culte et des biens ecclésiastiques.

A partir de cette date un grand nombre de communautés donatistes revinrent à l’orthodoxie, au point qu’un nouveau concile dut être tenu à Carthage en 418, pour achever le reclassement de centaines d’évêques.

L’arrivée des Vandales en Afrique en 429 et leur prise de Carthage en 439 détacha l’Afrique de l’empire romain pendant un siècle. Les historiens manquent d’informations à partir de cette époque sur ce qu’il advint du donatisme. Il est possible mais non prouvé que quelques communautés donatisques désormais indépendantes se soient maintenues en Mauritanie ou en Numidie. En 533-535, les byzantins reconquirent en partie les provinces d’Afrique, mais l’historien Procope ne mentionne pas les donatistes dans sa « Guerre contre les Vandales », tandis qu’une loi de Justinien en 535 interdisait tout culte aux « donatistes, juifs, païens, ariens et autres hérétiques ». Cette énumération traduisait-elle une présence réelle ou un simple effet oratoire d’accumulation ? Enfin la laborieuse conquête arabe de l’Afrique du Nord, depuis le raid sur Sbeitla en 647 à la chute de Carthage en 698, et celle de Ceuta en 709 fit définitivement passer le donatisme dans l’oubli, les conquérants ne faisant aucune distinction entre chrétiens.

Les anabaptistes et d'autres Églises de la Réforme radicale ont vu en eux des prédecesseurs du fait de leur opposition à l'union de l'église et de l'état. Les donatistes voyaient les autres chrétiens comme impurs et corrompus.